LA PROF SUSPENDUE (54)
LA LETTRE D'ANDRE ROSSINOT :
Catherine Pederzoli, une professeur d'histoire de Nancy, de confession juive, a été suspendue de ses fonctions pour avoir manqué à ses obligations "de neutralité et de laïcité" en organisant des voyages scolaires dans des camps de concentration. La prof de 58 ans du lycée public Henri-Loritz de Nancy, avait l'habitude d'organiser des voyages en Pologne et en République Tchèque depuis une quinzaine d'années avec ses classes de seconde, première et terminale. "Depuis l'arrivée d'une nouvelle direction de l'établissement en 2007, on s'acharne contre elle, on veut s'en débarrasser", dénonce l'avocate. "La faute que l'enseignante a commise n'est-elle pas d'être juive?", interroge Me Tadic, qui a saisi mardi en référé le tribunal administratif pour suspendre la décision du recteur. Le tribunal devrait se prononcer d'ici 15 jours. Mme Pederzoli a fait l'objet d'une enquête de l'Inspection générale de l'Education nationale suite à une manifestation organisée par certains de ses élèves en décembre dernier à Nancy, lors d'un déplacement du ministre de l'Education nationale, Luc Chatel. Les lycéens protestaient contre la décision de réduire de moitié le nombre d'élèves participants au prochain voyage. La professeur d'histoire avait été suspectée d'avoir organisé la manifestation et manipulé ses élèves. Dans un rapport rédigé en juillet, les inspecteurs pointent des "manquements aux obligations de réserve, de neutralité et de laïcité", et reprochent à l'enseignante l'"instrumentalisation des élèves" par des "lavages de cerveaux". Les auteurs notent en outre que, lors de leur entretien avec la professeur, cette dernière a prononcé 14 fois le mot "Shoah", "tandis que le terme à la fois plus neutre et juridiquement fondé de génocide n'a été mentionné que deux fois", écrivent-ils. Dans un communiqué diffusé mardi soir, le rectorat de l'académie de Nancy-Metz a souligné qu'il avait demandé une enquête sur cette enseignante à la suite d'un "certain nombre de dysfonctionnements" dans son lycée. Le rectorat "insiste sur le fait qu'il s'agit d'un dossier relevant de la problématique générale de l'organisation des voyages scolaires, sans rapport avec le sujet de la transmission de l'histoire et de la mémoire de la Shoah, à laquelle l'Education Nationale est très attachée". L'enseignante, souligne l'administation, fait l'objet d'une "mesure conservatoire de suspension à fin de complément d'instruction", mais cette mesure "ne se confond pas avec une sanction". En outre, la professeur continue à être rémunérée pendant sa suspension.